j’ai eu la chance de produire cette présentation dans l’ouvrage “passer au design thinking édition 2” dont je vous propose le contenu ici.

intro

L’approche du design systémique est une manière de voir le monde: tout est système. Un objet, un produit, un service, une organisation, notre planète…Il est alors possible d’utiliser les outils et méthodes venant des différentes sciences des systèmes complexes pour nos démarches designs lorsqu’on souhaite adresser des problématiques complexes.

Why

Les manières de concevoir sont souvent trop linéaires et réductives. Par exemple, dans la conception de véhicules: de l’extraction des matériaux à l’assemblage dans des chaînes de production avec en sortie un produit vendu dont le fabricant n’est plus directement responsable.

Cette production linéaire entraîne son lot d’externalités négatives: pollution, déchets, répercussions socio-économiques et culturelles, etc…

Étudier et visualiser toutes choses comme un système permet de porter un regard plus conscient pour des décisions plus éclairées. Cette approche permet un travail en cohérence avec les besoins humains réels et de respecter au mieux les systèmes alentour.

How

L’initiation d’une approche systémique se fait par la compréhension du contexte du système. C’est lui qui va conditionner et orienter le choix des outils et méthodes les plus adaptés.

Par exemple, la mise en place d’un nouveau service: la manière de concevoir ce système sera totalement différente suivant le contexte économique, culturel, géographique, politique…

Avec le contexte bien posé, le designer va ensuite accompagner le groupe de travail dans la modélisation de ce système et ainsi pouvoir le visualiser: c’est ce qu’on appelle le “mapping systémique”. Cette “map” sera utile uniquement dans le cadre de l’étude en cours. C’est un point essentiel lorsqu’on approche la complexité: rien n’est figé, rien n’est exact; tout ce qu’on crée est support de travail “suffisant” pour guider les choix et faciliter les décisions, mais ne permet pas d’attendre la certitude.

Cela dit, il vaut mieux accepter la complexité et agir en conséquence plutôt que la fuir et agir comme si tout était “simple et sous contrôle”, ce qui risquerait d’entraîner de nouvelles chaînes de problèmes inattendus…

Il conviendrait alors de remplacer la démarche “problème > solution” par “challenge > stratégies d’interventions”.

What

Le design systémique est adapté à des sujets complexes et pour lesquels les outils et méthodes plus classiques du design thinking seraient trop limitants.

Quelques exemples:

• Automobile: ne plus vendre de véhicules directement mais plutôt développer un service de mobilité qui va nécessiter une co-conception multi partie-prenantes.

• Bâtiment: construire essentiellement avec des matériaux de réemploi et générer un minimum de nouveaux déchets.

• Loisir sportif: faire évoluer un modèle de vente de produits linéaire vers un modèle circulaire avec des propositions de services par abonnements.

Atelier Design Systémique - déroulé type

Pour modéliser et visualiser le système d’une entreprise et faciliter la prise de décisions en conscience et en seulement 3 jours.

Jour 0 – Préparation.

Journée nécessaire pour préparer les 3 jours: co-écriture des questions et objectifs de l’atelier, sélection et booking des participants, agendas, logistique…

Préférer une salle de créativité spacieuse et recouverte de tableaux blancs: l’espace va devenir au fil des travaux “la carte du système” grandeur nature.

Jour 1 – Mapping par les différentes parties-prenantes.

Première phase de mise à plat visuelle systémique de toute l’organisation par les différents points de vues créant ainsi une fresque systémique collective.

Chaque partie-prenante modélise son service & son fonctionnement avec l’aide du facilitateur. Il crée les liens, relations, processus, projets, personnes, fonctionnements spécifiques, dépendances avec les autres services ou des partenaires externes.

Jour 2 – Analyse systémique & diagnostique.

Ces même partie-prenantes (ou de nouveaux participants pour chaque service) présentent leurs systèmes et analysent ensemble les différents points de frictions et de fluidités tout en complétant et restructurant les systèmes si nécessaire.

Durant cette journée peuvent intervenir différents experts externes qui vont apporter des points de vues complémentaires : anthropologue, économiste, entrepreneur, scientifique, spécialiste réseaux, coachs, etc…

Jour 3 – Priorisations & axes de transformation.

En partant du système complet et du diagnostic de la veille, les différentes parties-prenantes ainsi que les membres de la direction priorisent des « nœuds de problématiques » qui deviennent les « points de départ de chantiers de transformations » à mettre en place.

Ainsi, toutes les parties-prenantes prennent conscience des urgences réelles et des démarches à mettre en place, par priorités, pour faire évoluer leur système commun. Ils peuvent ainsi plus facilement agir en coopération, en commençant par activer des premières actions locales, simples, concrètes et pragmatiques, avec une juste distribution des actions dans un rythme collectif.

Commentaires

Il est possible de réaliser cet atelier 100% à distance en travaillant dans un espace collaboratif numérique comme Miro. Cela dit, il est recommandé de le faire en physique pour faciliter l’immersion, la “promenade” dans le système qui va faciliter son appropriation par toutes les parties-prenantes.

Cet atelier est le premier pas pour prendre conscience du fonctionnement du système à un instant T et aider les dirigeants et autres partie-prenantes à prendre des décisions plus lucides et prioriser pour être tout simplement plus efficients au quotidien.

interview

Qui es-tu en quelques mots ?

Fabrice Liut, designer, facilitateur et systems thinker. j’accompagne les organisations et les institutions dans les étapes importantes de leurs évolutions en apportant des outils, méthodes et modèles facilitant les coopérations nécessaire pour adresser des enjeux complexes.

L’impact que tu aurais dans ton rêve le plus fou ?

Pour moi, le Design Systémique permet de prendre en compte la profondeur et la largeur des enjeux sociaux, écologiques et économiques actuels et d’agir bien plus en conscience et efficacement qu’autrement.

Alors mon rêve serait de participer à un mouvement “régénératif” qui viendrait transformer notre société pour une nouvelle version plus équilibrée, belle et en lien avec le vivant.

Qu’est-ce qui t’inspire autant dans cette approche ?

Une citation pour illustrer: “la vie ce n’est pas les molécules mais les liens entre les molécules.”

Avec un regard porté sur le monde en systèmes, nous pouvons comprendre, sentir et vivre profondément que tout est lié, que tout est en interactions et qu’il est illusoire voir dangereux de continuer d’agir comme si tout était séparé et isolé…

C’est une approche qui rend plus humble et qui ouvre l’attention sur la qualité et la responsabilité de chacun de nos gestes et de nos choix.

Quelles sont les différences avec le Design Thinking ?

Ce sont deux approches complémentaires qui viennent s’enrichir l’une l’autre et qui “en combo” viennent ouvrir plus large le champ des possible.

Si au départ la question est complexe, il sera adapté d’activer l’approche systémique pour une phase d’observation, de recherche, de modélisation du système, d’analyse et de priorisation des actions à enclencher. Lorsque tout est posé et bien clair, il est temps de générer des concepts, de prototyper et de tester: alors le Design Thinking prend le relais.

Selon moi l’important est de faire face à la complexité sans pour autant “sur-complexifier”.

Tu peux nous raconter un cas où cet atelier a eu un impact important ?

2 communes fusionnent pour devenir une commune nouvelle. Gros écart de culture et de fonctionnement entre les 2 et beaucoup de résistances à ne faire qu’une. Une compréhension et une lecture très floue entre le rôle des agents et celui des élus.

Suite à plusieurs ateliers mêlant agents et élus - faisant travailler tout le monde ensemble pour la première fois autour d’un système commun - ils créent cet objet permettant de visualiser les services rendus à la commune d’un côté et les politiques publiques de l’autre ainsi que les liens d’influences entre les deux.

Grâce à ce “système” ils disposent maintenant d’un outil visuel et évolutif pour lire le fonctionnement de la commune. Les rôles et les responsabilités sont clairement définis ce qui fluidifie leur organisation et l’unification.

Nous avons eu la belle opportunité d’adresser un besoin à la fois organisationnel, culturel, social et territorial… c’est passionnant et très enrichissant comme cas d’étude!

Quels seraient les conseils que tu donnerais à quelqu’un qui se lance dans un atelier de Design Systémique ?

• Inviter les bonnes personnes pour cerner toutes les dimensions du système à étudier.

• Commencer par bien définir et comprendre le contexte du système avant de travailler sur le système lui-même.

• Ne pas chercher à obtenir une modélisation parfaite du système, de toute manière il va évoluer rapidement.

• S’entraîner à modéliser des systèmes simplement: prendre une feuille A0, des feutres et c’est parti! Votre cerveau fera des liens de plus en plus facilement et va s’ouvrir à plus de complexité.

Un mot pour la fin ?

Les sujets de la complexité et de la systémique sont des sujets scientifiques rigoureux qui demandent une grande humilité et un grand respect - à grand pouvoir grande responsabilité!

Ainsi, ce que je produis et partage sur le sujet n’a pas la prétention d’être des objets scientifiques; je reste avant tout un designer qui explore et découvre par la pratique et partage à d’autres ce qui fonctionne de mes expériences.

C’est à vous de faire vos propres expériences et de rencontrer beaucoup d’acteurs du sujet - vous pourrez ainsi construire votre approche singulière et apporter la richesse de votre diversité au monde!

Merci de votre lecture, vous pouvez me contacter sur liut.me